Un bonsai ou l'image d'un arbre

Bonjour à toutes et à tous,

 j'ai regardé un peu en arrière sur PB,  je n'ai pas vu s'il avait été débattu de ce sujet, surement.

Bien souvent , des amateurs me font remarquer que certains arbres sont construits comme des conifères avec leur silhouette , alors que leur essence justifierait un port différent.

 Ma première interrogation , un bonsai doit il correspondre exactement  à son homologue naturel sachant que la nature les façonne parfois bien différents les uns des autres : selon les conditions de lieux (collines, plaines) , de conditions climatiques régionnales, souvent de son âge et bien d'autres etc...

 

Autre petit exemple : existerait il beaucoup de satsuki si nous leurs donnions la forme naturelle d'une azalée pleine terre ?

 

Quand je vois des masters pièces de feuillus, reflétant le vieil arbre dans toute sa splendeur , il a bien l'immense majorité de sa ramure qui s'est inclinée vers le sol . 

salut, c'est marrant on en parlait plus ou moins avec un ami cet après midi.

 

c'est venu en parlant d'un érable du japon, qu'il serait inapproprié de le faire en forme battu par les vents étant donné que l'érable du japon n'aime pas le vent... même si la culture du bonsaï et le fait que la forme ne vient pas du vent le permettent.

ça a dérivé ensuite sur le fait que les "plateaux" étaient plutôt réservées aux conifères qu'aux feuillus.

 

mon avis personnel: c'est un avantage de garder l'"esprit" de l'essence que l'on forme en bonsaï, ça lui rajoute un charme naturel. je suis hélas passé à coté de cette vision du bonsaï pendant trop longtemps, ce n'est pas toujours facile à appliquer et encore moin à rattraper sur des feuillus que l'on a commencé à former comme des conifères.

 

C'est surtout le cas pour les essences d'arbres (6m et +), quand on commence à travailler des essences d'arbustes... sauf exception, il n'y a pas vraiment d'"esprit" à retransmettre, comme l'azalée que tu cite et bien d'autres.

 

ma compagne (qui n'y connais strictement rien mais voit et commente mes bonsaï ou ceux des magasines à sa façon) a tendance à préférer ceux qu'elle arrive à imaginer dans la nature, dans une scène de vie, avec des animaux ou des gens qui se promènent en dessous, sur le flan d'une montagne etc... Elle a entre autre un faible pour les formes en balai (pas de jeux de mot sur les femmes qui aiment les balais svp! :spb102:) et les forets. Elle n'apprécie pas certains arbres de haut niveau (parmis ceux des magasines) par exemple avec des formes alambiquées et beaucoup de bois mort car elle n'arrive pas à se les représenter en grand. Donc le coté naturel peut aussi toucher des "incultes" de la même manière que les bonsaï de jardinerie sont l'image du bonsaï pour de nombreuses personnes.

 

Cependant, il y a un esprit à garder, mais certains détails à modifier et/ou amplifier (proportions, directions des ramifications fines, conicité...), pour que le résultat soit superbe, c'est normal qu'un bonsaï (œuvre artistique) ne soit pas juste un modèle réduit d'un arbre de la nature.

ça dépend de la perception que l'on a ...tout comme un arbre peut plaire à certains mais pas à tous....Moi par ex j'accroche pas sur un prunus mahaleb ou un érable construits comme un pin.Je pense que je n'apprécierai pas non plus un pin construit comme un feuillus.C'est en partie lié à mon apprentissage.Après le regard que j'ai aujourdh'ui n'est pas celui que j'avais hier.Par contre je peux apprécier des burtons sans doute à cause du côté imaginaire.J'aime pas non plus les arbres trop stéréotypés.Après c'est fugace, je dois ressentir une émotion.Ce  n'est que ma vision et il y en a pleins d'autres puis le premier à satisfaire n'est pas le spectateur mais l'artiste non ?.@+

Pour moi un pin forme naturellement des plateaux, plus ou moins rigoureux, mais quasiment toujours des plateaux!^^

Si ce n'est pas le cas, bien souvent c'est que l'arbre est encore à un stade juvénile. En tous cas c'est ce qu'il m'inspire.. Il peut être grand certes, plus que ses voisins, mais c'est qu'il a des conditions plus favorables qu'eux.

J’essaierai de faire un docu photo la dessus l'été prochain lorsque je retournerai en montagne, car en plaine c'est moins évident à montrer.

 

Le feuillu à l'inverse, est un peu plus libre je trouve. Même si tu a raison quelque part, ses branches ploient souvent vers le bas. Mais la ramification va grandissante vers le haut, ou plus généralement vers la lumière. Ce qui conduit les branches hautes à avoir des angles plus fermés que les branches basses (puisque les branches basses n'ont d'autres choix que de pousser vers les cotés)

Perso je comprend ça de manière mécanique, car les feuillus ont un bois plus rigide que les pins. Ce qui leur permet de construire une ramification plus imbriquée d'une branche à l'autre. Au final les branches se soutiennent, en même temps qu'elles se "font la guerre", dans un joyeux bordel.

Le pin à l'inverse va mettre ses chandelles vers le haut, mais la gravité va vite prendre le dessus sur la rigidité..

Déjà il ressort que le lieu où pousse l’arbre est un critère de base.

L’exemple typique pour moi est le chêne . De la fenêtre de ma cuisine, je peux admirer un grand quercus entre 25 et 30 m seul, au milleu du champ ,rigoureusement droit avec un houpier en balai parfait.

Boots est entouré de beaux chênes surement aussi vieux, qui ont des branches bien tordues, des troncs sinueux de bonnes tailles . Une toute autre forme.

Si je monte dans les collines pierreuses qui m’entourent, je suis aussi grand que beaucoup de chênes qui poussent là depuis plusieurs dizaines d’années. Si on remplacait leurs feuilles par des aiguilles , ils seraient de parfaits junipérus tant leurs troncs sont torsadés dans tout les sens.

Une forme encore plus différente.

Un jour un ancien président de la fédé que j’amenais dans la colline me fit cette reflexion : " si les japonais les voyaient ils arracheraient au trato pelle "…

Oui, mais ces trois types de chêne ont tous le même genre de ramification terminale. Soit légèrement horizontale,  tournée vers l'extérieur sur les coté, et remontant vers le haut sur le tiers supérieur de l'arbre. Les branches finissent par s'imbriquer un peu les une dans les autres.

 

D'ailleurs ça me fait penser à autre chose. Prend un pin, secoues les branches (comme l'action du vent) les branches vont se séparer les une des autres car de par les aiguilles présentent en permanence sur l'arbre, elles ne peuvent pas se réimbriquer.

Si une brindille se coince au milieu d'une autre branche, la brindille mourra car elle sera à l'ombre. Ce qui conduit naturellement à une formation de plateau

Alors que sur un feuillu elles peuvent facilement de réemmêler lorsqu'elles n'ont pas de feuilles. Puis au printemps, même l'une dans l'autre, un bourgeons arrivera à trouver la lumière et viabilisera le truc.

Déjà il ressort que le lieu où pousse l'arbre est un critère de base.

L’exemple typique pour moi est le chêne . De la fenêtre de ma cuisine, je peux admirer un grand quercus entre 25 et 30 m seul, au milleu du champ ,rigoureusement droit avec un houpier en balai parfait.

Boots est entouré de beaux chênes surement aussi vieux, qui ont des branches bien tordues, des troncs sinueux de bonnes tailles . Une toute autre forme.

Si je monte dans les collines pierreuses qui m’entourent, je suis aussi grand que beaucoup de chênes qui poussent là depuis plusieurs dizaines d’années. Si on remplacait leurs feuilles par des aiguilles , ils seraient de parfaits junipérus tant leurs troncs sont torsadés dans tout les sens.

Une forme encore plus différente.

 

C'est vrai! j'avais oublié d'en parler mais je suis totalement d'accord, pour les arbres poussant dans des lieux aux conditions différentes, qui ont une influence sur leur morphologie. C'est d'ailleurs en soulignant cet aspect que les présentations autour du bonsaï (plantes d'accent, tablettes, tableaux...) prennent tout leur sens et leur intérêt.

 

Un jour un ancien président de la fédé que j'amenais dans la colline me fit cette reflexion : " si les japonais les voyaient ils arracheraient au trato pelle "...

c'est ou???? :spb85:

dans les causses très très caillouteux et arides ;)

mais si tu veux prélever il te faudra surement un marteau piqueur :spb44:

Ces paroles me plaisent beaucoup


 

c’est un avantage de garder l’« esprit » de l’essence que l’on forme en bonsaï, ça lui rajoute un charme naturel. je suis hélas passé à coté de cette vision du bonsaï pendant trop longtemps, ce n’est pas toujours facile à appliquer et encore moin à rattraper sur des feuillus que l’on a commencé à former comme des conifères.

 

Cependant, il y a un esprit à garder, mais certains détails à modifier et/ou amplifier (proportions, directions des ramifications fines, conicité…), pour que le résultat soit superbe, c’est normal qu’un bonsaï (uvre artistique) ne soit pas juste un modèle réduit d’un arbre de la nature.

Pas mal de vérité .

L’oeuvre artistique même si elle puise sa source dans la nature n’en est pas le reflet du miroir.

Parfois devant un très beau charme je serais le premier à dire tout le naturel qui émane de ce bonsai, est ce vraiment le but qu’il fallait atteindre, ou la copie miniature parfaitement bien faite.

Quand je reste en admiration devant le charme qui tronait à Mulhouse, j’ai beau chercher au plus profond de mes souvenirs de ballades en charmilles, jamais de ma vie je n’en ai vu un bati aussi parfairement avec des branches formant de tels angles avec le tronc.

Il est le modèle du charme extrement vieux poussant en solitaire , contre nature pour cette variété, plutôt en groupe. Pourtant ,il est magnifique…

Pour ma part faut trouver le point d'équilibre entre bonsai, naturel et atistique, c'est pas si simple.@+

Oui ce n’est pas si simple.

J’ai débuté mon parcours seul dans mon coin , puis club , puis formation assez solide avec des « bonnes pointures ». J’ai suivi, en bon élève les bases de la codification.

Puis je me suis parfois écarté du chemin me laissant guider par mon inspiration . Une partie de spectateurs va trouver des créations magnifiques une autre va me dire pas possible avec un tel arbre, c’est contre nature, argumenter à juste titre pour démontrer ses dires.

L’exemple est déjà donné plus haut, il demeure techniquement vrai.

Cepandant, quand je forme ma branche et que je supprime les départs vers le haut et ceux vers le bas, qui donne une autre image, ai je tort d’avoir une vision artistique qui va à l’encontre d’une vision technique

un questionnement bien compliqué!

qu'est ce que le bonsaï? quels codes sont indissociables de cet art? quels autres codes peuvent être transgressés?

peut être qu'il faut en revenir à la définition même du bonsaï (arbre en pot) et se sentir libre. Mais connaitre les codes japonais et analyser les arbres "traditionnels" de haut niveau, c'est une grande source d'apprentissage etant donné que ces codes sont issus de l'intelligence collective de tous les bonsaika depuis des siècles.

 

mais c'est un art et chacun peut le pratiquer à sa manière à partir du moment ou ce n'est pas par ignorance mais par choix (je pense en particulier aux feuillus en plateaux). sinon il y a des risques de le regretter plus tard.

 

et pourquoi pas s'amuser avec des défis techniques comme faire un Cupressus sempervirens en cascade ? et pourquoi pas s'amuser à en faire un truc totalement WTF, en laissant repartir les branches à la verticale pour faire un genre de niwaki original en pot? (j'ai l'image en tête, c'est marrant) 

 

Il y a quelques centaines d'années, qu'est ce que les peintres auraient pensé de l'art abstrait? qu'aurait pensé Mozart du métal ou de l'électro? par contre il est bon de remarquer que l'apparition de nouveaux mouvements au sein d'un art ne rend pas les précédents obsolètes. et les compositeurs de métal ou d'électro utilisent quand même des bases communes avec la musique classique (accords, phases dans un morceau...) 

 

il y a peut être 3 questions:

-qu'est ce qu'était le bonsaï?

-qu'est ce que le bonsaï?

-qu'est ce sera le bonsaï?

voir plus de questions étant donné que ça va surement évoluer différemment selon les régions du globe.

 

Bref, à y réfléchir, mon avis est qu'il faut en connaitre le maximum sur l'art du bonsaï et son histoire, et faire ses choix artistiques personnels.

Julien

Je crois que tu rejoins pleinement mon sujet et les interrogations qui en découlent .

Je ressens parfois de légères blessures quand certains se permettent des critiques assez vives et je me pose des questions qui me font douter de ma création. D’autres me font chaud au coeur, heureusement.

Il ne faut pas defendre avec véhémence tel ou tel point de vue sur le bonsai. Surtout croire détenir la science infuse, aussi doué soit on.

Garder la curiosité pour tout ce que peut engendrer la fibre créatrice. Respecter toujours.

Un truc qui nous touchera aussi certainement, je pense que tu as appris à faire du bonsai à une certaine époque.Les mises en forme de cette époque ne sont plus forcément celle d'aujourdh'ui et la perception a aussi changé.Je pense aussi qu'il n'y a pas qu'une façon de faire du bonsai comme la peinture , il existe plusieurs école, après on aimera ou pas suivant ces gouts et sa sensibilité.

un jeune talent montant m'a dit un jour : ils sont beaux tes arbres mais ils ne sont plus à la mode.

C'est un élève de l'école italienne

A mon avis, et j'y mets toute l'humilité possible dans ce que je pense, il faut avoir en tête que le bonsaï fait partie d'une culture asiatique et comme tel en est une sorte d'artefact, un symbole d'une idée de nature. Les Japonais, comme les Chinois et les Coréens sont particulièrement sensibles à la nature, y compris d'un point de vue spirituel, du moins avant les grands bouleversements politiques et économiques de la fin du XIXème et tout au long du XXème siècle. La représentation de la nature dans les peintures japonaises ou chinoises est intrinsèquement idéalisée, dépouillée à l'extrême parfois, souvent baroque. C'est avant tout une projection mentale, édifiée selon des principes bouddhistes, essentiellement zen au Japon, avant l'édification du culte Shinto comme religion officielle. La plupart des peintures japonaises représentant un paysage (Sansui) est construite intellectuellement avant d'être jetée sur le papier ou la soie à coups de pinceau et d'encre. Il n'y a pas nécessairement désir, ni même besoin de représenter un paysage de façon réaliste.

 

Le bonsaï est je pense issu de cette mémoire là. Peut-être associé en des temps anciens, sous l'ère Muromachi puis au long de la période Edo à des pratiques de méditation dans les temples, principalement issus de sectes zen importées par des moines chinois, avant l'ère des Tokugawa et la fermeture du Japon à l'occident et à la Chine.

 

Ensuite l'art du bonsaï a certainement évolué vers une vision plus profane, gagnant en liberté et en poésie. De nos jours, et avec notre culture occidentale, je pense qu'il faut chercher avant tout à rendre un arbre expressif, c'est à dire exprimant des qualificatifs positifs tels que force, grâce, harmonie, beauté, élégance, équilibre mais aussi des caractères plus "mortifères" : fragilité, avanies de la vieillesse, affres du temps, douleur, afflictions dues aux épreuves météo, déséquilibre. Ces caractères pouvant plus ou moins se mélanger et s'interpénétrer, selon ce que nous souhaitons mettre en valeur. La construction d'un arbre s'associe à une idée de nature plus qu'à une volonté de la copier.

 

Quand nous choisissons un arbre avec du bois mort que nous cherchons à révéler, nous n'espérons ni plus ni moins que la beauté d'une patine ou l'usure d'un bois traduise la personnalité de l'arbre et le grandisse, le faisant passer de simple bout de bois à bonsaï: arbre remarquable. Et en même temps, tout le travail des branches et des rameaux doit exprimer légèreté, ordre, harmonie, parfois en contradiction apparente avec le maelström d'une écorce fissurée ou d'un bois mort craquelé et déchiqueté.

 

De cet antagonisme, ou au contraire de la seule harmonie de la construction de l'arbre, nait la poésie d'un arbre qui saura nous émouvoir ou pas. La beauté est parfois cachée, moins évidente à embrasser. Elle se révèle discrètement, dans la construction apparemment banale des branches qu'un amateur aura patiemment et sereinement taillées, avec toute la sincérité qu'il aura apportée à ses travaux. D'autres arbres sont plus évidents, plus fracassants aussi dans leur caractère, emphatique, parfois excessif. Le bois mort se fait alors sculpture que le feuillage vient souligner, d'autres ne se montrent agréables à regarder qu'avec leur feuillage fragile et aérien qu'un rayon de soleil vient illuminer.

Bonsoir les amis,

Un sujet intéressant Didier.

Je mintersse au chêne vert depuis quelques semaines et jen ai trouvé un dun aspect très naturel.

Cest un arbre qui fait appel à mes souvenirs denfance, aux idées que je me fais dun chêne vert dans la nature. Cest un arbre dans un pot. Cest un arbre qui ne respecte pas ou peu les suggestions codifiées par les maîtres japonais des deux ou trois dernières générations mais il respire le chêne vert et le naturel. Il na pas besoin de plus que dexprimer son essence propre, cest ce naturel pure qui est transcendé dans le beau.

Je suis tombé sur cette citation de Thierry Font dans un sujet commencé en 2011 sur un chêne vert et dont jai aujourdhui demandé des nouvelles (pas de Thierry qui nous a quitté trop tôt et avec qui je nai pu discuter que deux fois !)

Merci pour ces paroles :

[…] attention de pas en faire un bonsai !! le chene vert , avec une aide legere construit tres bien ses branches " de chene" tout seul.

Salutations

P.S : jai posté ce message en même temps que le message de Gwinru. Mon message nest en aucun cas une contestation de ce que dit Gwinru qui partage avec nous ses connaissances de lhistoire et de lévolution de la culture artistique du Japon et de ses influences sur leurope. Cest très juste et parfaitement bien écrit.

Je voulais partager des ressentis plus personnels et naturalistes dune certaine approche du bonsaï en tant que arbre en pot et non pas en tant que bonsaï ou objet codifié asiatique.

J’ai un prébonsai de chêne vert si tu veux je peux le mettre en sujet

Papilou tout ajout de sujet et conseils de culture fait et fera évoluer les connaissances.

Bien sûr, ton sujet est bienvenue !

Le chêne vert m'intéresse aussi, même s'il n'est pas tout à fait dans ma culture, j'en ai un tout jeune que j'essaie de cultiver tant bien que mal. Vu la citation de Thierry Font (merci Le Sabi :) ) je vais lui foutre la paix