Plaidoyer pour le Cornouiller mâle, un arbre miraculeux

Le cornouiller mâle (Cornus mas) est un arbre que l'on voit trop rarement en bonsaï. On se demande pourquoi.

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Cornus mas de Armando dal Col (Italie)

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Walter Pal (Allemagne)

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Heinz (Allemagne)

 

Il présente tellement d'avantages que si un débutant me demande par quelle essence il doit commencer pour découvrir l'art du bonsaï je lui réponds sans aucune hésitation : Cornus mas.

 

Les caractéristiques de l'espèce sont telles qu'on est sûr que ce débutant ne sera pas déçu ou démoralisé par sa première tentative. Jugez-en plutôt :

 

1/ Caractéristiques phyto-sanitaires

- absence totale de maladies cryptogamiques, genre oïdium, verticilliose, gommose, mildiou, rouille, tavelure etc...

- pas d'attaque de pucerons, de chenilles, de galles, de cicadelles, de guêpes découpeuses etc... même les escargots les délaissent

- pas de sensibilité bactériologique

 

Trouvez moi une autre espèce aussi robuste face aux attaques en tout genre

 

2/ Caractéristiques de culture

- Il est résistant à la sécheresse

- Une température hivernale de -20°C ne lui pose pas de problème

- Il pousse d'avril à septembre quasiment en continu

- Les feuilles se réduisent parfaitement

- Il ramifie bien et bourgeonne en arrière. Il est prévisible.

- Il réagit bien à la taille des grosses racines

- Le bois mort se conserve bien : aussi bien que les prunus ou que l'aubépine

 

3/ Caractéristiques esthétiques

- Floraison superbe avant l'apparition des feuilles et avant tous les autres arbres autochtones.

- Écorce "sauvage" qui se desquame en laissant apparaître des zones plus claires

Enfin, la cerise sur le gâteau : Ses fruits, les cornouilles, qui ressemblent à de petites cerises oblongues sont délicieux. On peut en faire des confitures très fines.

 Comment en dénicher un ? On ne le trouve pas facilement chez les pépiniéristes du moins en ce qui concerne la variété botanique. S'ils en vendent il s'agit souvent de cultivars de l'espèce.

Reste le prélèvement et là aussi c'est un tour de force que de le repérer en fin d'hiver avant sa fleuraison . Son port et ses bourgeons sont très similaires à Cornus sanguinea qui présente infiniment moins d'intérêts pour le bonsaï-ka. Quand on trouve du C. sanguinea, le C. mas ne se trouve pas forcément dans les environs. Mais l'inverse est souvent vrai.

On l'aura compris le Yamadori de C. mas est un challenge. Mais avec un peu de patience, un soupçon d'observation on y arrive.

Alors, qu'attendez vous pour partir en repérage ?

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Joli plaidoyer, merci Bonsaïphil

J'ouvrirai l'oeil

;)

 

Effectivement, il y a de quoi...

Une image issue du site de Wolfgang Putz (http://www.yamadori-bonsai.info/Putz_start.html)

 

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Oui, merci pour ce sujet.

 

J'ai une première question : comment fais tu la confiture? Le volume de chair dans les drupes équivaut à peu près à celui du noyau, ce qui rend la récolte de la chair fastidieuse.

Faut-il malgré tout dénoyauter ou faire cuire le fruit entier et puis filtrer séparer les noyaux?

Concernant la récolte des fruits de Cornus mas pour une simple dégustation ou pour la confiture ou plutôt la gelée. Car je n'ai jamais fait cette expérience culinaire. En revanche j'en ai mangé cru et c'est vraiment délicieux.

Il vaut mieux cuire avec les noyaux, mais ils ne faut pas qu'ils s'ouvrent pour laisser s'échapper l'amande qui risque de contenir des composés cyanurés.

La proportion de chair et de noyau pour la variété botanique c’est effectivement 50%-50%.

Mais il existe une variété Cornus mas « Jolico » avec un noyau qui fait environ 10% de la masse totale du fruit. La cornouille elle-même pèse environ 6 à 7 g et comme toutes les cornouille elle est très sucrée avec un fort taux de vitamine C.

Cette variété Jolico a été découverte dans un ancien jardin botanique en Autriche.

 

Il faut savoir aussi que selon les variétés de Cornus mas on peut avoir des fruit rouge (variété botanique) ou blanc, jaune ou violet.

Les variétés que je connais :

  • 'Elegant' : variété précoce ukrainienne
  • 'Jolico' : cultivar allemand à gros fruit sucré.
  • 'Pioneer' : gros fruit de 3,5 cm de long en forme de poire, juteux, sucré et aromatique. USA
  • 'Redstone' : gros fruit hâtif ; arbre très rustique
  • 'Yellow Fruited' : fruit jaune
  • ‘Alba’: Fruits presque blancs.
  • ‘Aurea’: Feuilles jaunes, fruits rouges
  • ‘Elegantissima’: Feuille partiellement bordées de jaune ou rose, ou entièrement jaune
  • ‘Flava’: Fruits jaunes.
  • ‘Macrocarpa’: Fruits plus important que pour l'espèce botanique, en forme de poire, en culture dans les Balkan et au Caucase. Fruits décoratifs.
  • ‘Nana’: Port nain et sphérique.
  • ‘Pyramidalis’: Port érigé, avec des entrenoeuds très courts. Très rare.
  • ‘Variegata’: Feuilles à bords larges blancs
  • ‘Violacea’: Fruits rouge-violet décoratif. Fruits décoratifs.

@Papymandarin;

Les caractéristiques phyto-sanitaires ont du t'interpeller : c'est à l'opposé de Acer palmatum ;-)

  • 1 avec Papy :+1:t2:. Et puis, on peut être fou des érables :joy: et avoir aussi un petit cornouiller :smirk:…Attachment 264567 not found.

 

il est fort probable que cultive au japon, le Cornus mas serait considere comme une plante fragile

Je rebondis sur ta dernière phrase pour mentionner un Cornouiller extrêmement proche de Cornus mas. Il s'agit de Cornus officinalis qui pousse au Japon et en Corée. Les deux espèces sont tellement proches qu'on pourrait s'étonner du fait que C. offinalis ne soit pas une variété du premier. Port, sols, fleurs, fruits, écorce, rameaux, résistances climatiques tout est pareil. La seule différence notable - et encore ! - c'est un détail des feuilles.

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Cornus mas possède 3 à 5 nervures.

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Cornus officinalis 6 à 7 nervures pour une feuille légèrement plus large.

(Source : arbusticulteurs.com)

 

On pourrait donc en conclure que Cornus officinalis est un aussi bon candidat pour les bonsaïs que Cornus mas.

Ok, merci. J'essayerai la gelée par cuisson ou pré-cuisson du fruit entier jusqu'à délitement de la chair, en faisant une estimation du rapport chair-noyaux pour le dosage en sucre.

 

Je dois avoir la variété botanique car les fruits sont oblongs et petits (guère plus de 1,5cm dans la grande largeur), avec une acidité assez prononcée.

 

En hiver, je pourrai envoyer des noyaux par la poste si vous êtes intéressé. J'ai aussi des jeunes pousses mais le conditionnement est plus délicat.

une recette.

Pour tous ceux qui seraient tentés de prélever un Cornus mas, j'aimerais partager ici une de mes expériences.

 

A la fin de l'année 2013 je me mets en tête de trouver un Cornus mas, suite à la perte d'un arbre de cette espèce quelques années auparavant. J'étais tellement frustré de son absence, de sa floraison précoce, de la générosité de l'espèce que je suis revenu sur les lieux de ma première trouvaille des années 1990.

On est en plein hiver, c'est la gadoue, il fait froid, c'est hostile. Je passe trois mois à ramper, à scruter, à essayer de différencier sur le terrain Cornus sanguinea de Cornus mas. J'en étais arrivé à marquer de rubans en plastique certains arbres qui semblaient plutôt convenir à ma quête effrénée. Je ne saurais pas dire pourquoi et comment, mais au mois de janvier 2014 j'étais en mesure de reconnaître l'un de l'autre sans feuilles et sans fleurs. Quand fin février 2014 des arbres adultes ont commencé à fleurir autour de mes trouvailles j'ai pu conforter mes choix. J'avais eu tout le temps de demander les autorisations de prélèvement. Tout était prêt.

Dans ma frénésie de détermination j'avais marqué du fameux ruban des C. mas qui avaient à priori peu d'intérêt pour un prélèvement. Tout se passais comme si je cherchais plutôt un génome qu'un arbre.

Je passe à l'action début mars, j'ai fait le tour des arbres possédant mon petit ruban et j'ai cherché (entre autres) celui-ci :

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Si cela avait été une autre espèce, jamais, au grand jamais, je n'aurais envisagé ne serait-ce qu'une seconde, de toucher à cette tige de 3-4m de haut avec deux minuscules gourmands à la base. Et bien, le croirez-vous, je l'ai prélevé ! Quelle folie, d'autant plus qu'en rentrant je découvre le pompon. Les racines se réduisent à quelques tubes peu prometteurs

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On distingue bien les deux gourmands ridicules sur lesquels je vais fonder la construction du bonsai

La mort dans l'âme je mets l'arbre en caisse de bois (vol. 12 bouteilles de pinard). La même année (Août 2014) cela se présentait ainsi :

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Il avait repris, c'était miraculeux.

Ce message est bien assez long comme ça. Je tacherai de montrer ( message à venir) à quel point un prélèvement aussi scabreux est largement pardonné par cette espèce vraiment bienveillante.

Interessant ce sujet. J'aime bien la floraison précoce du cornus mas, petits ponpons jaunes disséminés dans les forets et annonciateurs du printemps..

 

J'ai prélevé ce cornus il y a 2 ans, je sais pas si c'est un mas ou un sanguin, les 2 poussent dans le coin ou je l'ai prélevé, tu vas surement pouvoir m'éclairer malgré les photos pourries...

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Jolie base !!

joli base en effet.

 

je dirais aussi mas.

si c'était un sanguinea, avec sa couleur rouge pétante en fin d'été/début d'automne tu ne douterais pas.

Malgré tout le bien qu'on peut en penser, le cornouiller est quand même un arbre difficile à former esthétiquement. Il perd facilement des branches car la vigueur se répartie différemment chaque année. J'en avais un depuis quelques années que j'ai revendu à cause de ça. Facile à cultiver certes mais ce n'est pas du tout un arbre pour débutant.

Il a d'autres défauts comme un épaississement du bois très lent ce qui induit des branches sans conicité.

alors voyons si j'ai bien retenu les explications de bonsaiphil sur les moyens de les differencier, je dirais que c'est bien un mas

Attention, j'ai donné plus haut les explications pour différentier C. mas de C. officinalis, ce qui n'a d'ailleurs pas beaucoup d’intérêt pour le yamadoriste européen puisque C. officinalis ne pousse pas naturellement dans nos forêt.

Alors comment différencier C. mas de C. sanguinea ?

Leur situation d'abord : C. sanguinea pousse en lisère de forêt ou dans des lieux ouverts, alors que C. mas privilégie les sous-bois

La couleur des rameaux : C. sanguinea possède des rameaux rouge (d'où son nom) s'ils ont été exposés à la lumière directe. Si  bien qu'on peut trouver des C. sanguinea avec juste le dessus des rameaux rougeoyants. Donc un Cornus autochtone avec des rameaux verts n'est pas forcément un C. mas !

L'écorce me semble le meilleur moyen de les reconnaitre tout au long de l'année. L'écorce de C. mas se desquame alors que celle de C. sanguinea , quoique rugueuse ne le fait pas.

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Ecorce de C. sanguinea adulte (photo de Ohe)

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Ecorce de C. mas adulte

 

Les photos de Synodontis sont un peu floues, mais je crois bien aussi que c'est un C. mas

... Il perd facilement des branches car la vigueur se répartie différemment chaque année.

....Il a d'autres défauts comme un épaississement du bois très lent ce qui induit des branches sans conicité.

perte de branches : jamais

épaissement du bois très lent : pas du tout d'accord, bien au contraire : les diamètres croissent à la vitesse grand V et j'en apporterai la preuve le moment voulu

 

perte de branches : jamais

épaissement du bois très lent : pas du tout d'accord, bien au contraire : les diamètres croissent à la vitesse grand V et j'en apporterai la preuve le moment voulu

 

Le cornouiller grossi très lentement c'est bien connu, c'est rare de trouver des gros diamètres dans la nature. Si tu observes bien les cornouillers dans la nature, tu verras qu'ils ont très souvent des branches mortes un peu comme tous les arbres qui buissonnent

 

 

Le cornouiller grossi très lentement c'est bien connu, c'est rare de trouver des gros diamètres dans la nature. Si tu observes bien les cornouillers dans la nature, tu verras qu'ils ont très souvent des branches mortes un peu comme tous les arbres qui buissonnent

 

Je ne connais pas de cornouillers ayant poussé en pleine nature mais j'en ai d'assez beaux dans mon jardin (5m de haut et s'étalant de plus en plus, pour un age que j'estime à 50 ans minimum). Ce ne sont effectivement pas des arbres impressionnants au premier coup d'oeil. Ils n'y a pas de branches qui meurent dans cette situation, peut-être parce qu'ils ne manquent pas de place.

J'en ai implanté quelques uns en pleine terre pour grossissement ou à un emplacement définitif. Je peux témoigner d'une très nette différence que j'attribue à la terre dans laquelle ils sont installés. Dans une terre de jardin sans travail particulier, la croissance et le grossissement sont au moins deux fois plus lents que dans la terre du potager, amendée au fumier et ameublie régulièrement depuis plusieurs années, et ceci pour une exposition et un entretien comparables.

@pj1234

 

"Le cornouiller grossi très lentement c'est bien connu, …."

Ceci est une contre-vérité que tu colportes sans argumenter

Il suffit de jeter un œil sur les deux branchettes de mon arbre lors de son prélèvement

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Et de comparer leur diamètre initial avec celui qu'ils ont acquis exactement deux années après :

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On passe de 4-5mm à 25mm (au printemps dernier) en 2ans

 

"….c'est rare de trouver des gros diamètres dans la nature …"

J'en connais un grand nombre qui ont des diamètres de tronc de 40-50 cm . Pour une hauteur qui culmine d'habitude à 8-10m maxi. C'est plus qu'honorable.

 

"...ils ont très souvent des branches mortes ..."

Là tu fait l'erreur de celui qui ne regarde que superficiellement.

Ce ne sont pas ses branches qui sont mortes mais son tronc. En effet on trouve très souvent des arbres qui ont moins d'une douzaine d'années dont le tronc s'est rompu sous l'effet des tempêtes, de la neige, des sangliers ou d'arbres voisins qui se sont abattus en l'affectant. Pourquoi ? Le bois du cornouiller mâle est hyper-dur. Il ne plie pas, il rompt.

C'était le bois par excellence pour les manches d'outils, bien supérieur au frêne ou au hêtre.

D'ailleurs c'est pour cela que les arbres intéressant du point de vue du yamadori sont justement ceux dont le tronc s'est cassé. L'arbre que j'ai perdu ainsi que les trois arbres que je cultive actuellement proviennent de tels accidents.

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Détail de mon cornouiller perdu

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Detail d’un autre cornouiller que j’ai en culture

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Cornouiller mâle d’Enzo Ferrari montrant les mêmes caractéristiques

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un C. mas en forêt

En regardant de plus près les bonsais de cornouiller que j'ai donnés dans mon premier message on peut reconnaître aussi leur récupération suite à une rupture de tronc dans la nature.

Mais une fois que l'arbre a atteint une quinzaine d'année, les sangliers peuvent toujours s'y frotter, il reste en place.

Mais comme il pousse en sous-bois, il n'est pas à l’abri de chutes d'arbres voisins. Mais je n'ai jamais vu un cornouiller mâle en bonsai perde une branche, à l'instar des bouleaux par exemple

 

"...un peu comme tous les arbres qui buissonnent "

Le cornouiller mâle ne buissonne pas. Le Cornouiller sanguin en revanche a un port buissonnant.

 

Tout cela me ferais plutôt croire que tes observations sont encore trop partielles.

Perso, un bois qui ne plie pas (et transmet donc toutes les vibrations) mais qui pète d'un coup sec, j'évite pour les manches d'outils... ;-)

Tu privilégies le confort de l'usager à l'efficacité et au rendement de l'outil.

Si tu faisais du vélo tu roulerais encore avec un cadre en acier ou en alu. Mais tout le monde privilégie le carbone. (Je parle de vélo et non de bicyclette)

Un manche de marteau en Cornouiller mâle ne pète pas, justement.

Ceci dit, je n'invente rien : manche d'outils, barreaux d’échelles, canes, armes, l'arc d'Ulysse, la lance de saint Georges  "c'est bien connu" comme dirait pj1234

Pour la lance de saint-George, il y a plusieurs versions: 

Dans les romans médiévaux, la lance (ou dans certaines versions, une épée longue) avec laquelle saint Georges terrassa le dragon fut appelée « Ascalon », du nom de la ville d'Ashkelon en Terre sainte. Un forgeron de cette ville la lui aurait façonnée dans un acier spécial.

 

(https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_de_Lydda)

 
Pour le confort, le frêne (par exemple) apporte à la fois le confort à l'utilisateur, et l'efficacité... Car à quoi bon utiliser une fois un outil, qu'il remplisse son office, et ensuite avoir les poignets en compote ? Si je ne peux pas utiliser un outil sur de longues périodes de travail parce qu'il est inconfortable, il m'est inutile... :-(
 
Pour le vélo, si j'en faisais, je pense que je privilégierais le carbone, pour un bon amorti des chocs (flexibilité et résistance)... comme le frêne pour les manches d'outils :-D
 
Mais bon, faut voir de quels outils on parle... évidemment que le choix de l'essence ne sera pas la même pour un ciseau à bois et pour une masse... comme en bonsaï, il n'y a pas de bons ou de mauvais bois, il n'y a que de mauvais usages... ;-)