Cosmic Bonsaï - Laurent Darrieux - Ryan Neil - Walter Pall

Je découvrais, il y a une dizaine d’années sur ce forum, une manière de faire du bonsaï qui m’était jusqu’alors inconnue. Les deux protagonistes de ce qui était alors connu sous le nom de « style Burton » sévissaient dans ces colonnes sous les pseudos @vev (Hervé DORA ) et @law (Laurent DARRIEUX).

Je me rappelle ne pas avoir épargné ces deux bonsaikas dans mes commentaires tant leur production était à l’opposé de ce que j’appréciais et apprécie encore aujourd’hui. Mais les réactions épidermiques sont souvent regrettables .

Alors que je venais aux nouvelles, hier, sur le site Mirai de Ryan Neil, je tombe sur un enregistrement podcast récent d’une discussion entre le bonsaika californien et Laurent Darrieux avec David Degroot. (en anglais étasunien, 1h40)

Après avoir écouté (presque) l’intégralité des échanges (parfois très francs !) je me suis reposé un peu en re-visionnant l’interview de Laurent Darrieux en français dans laquelle il livre sa démarche. Il faut écouter le passage dans lequel il explique à quel point le japonisme peut être un frein à la créativité pour un bonsaika occidental.

à 7min 50 : Pas de face avant ou arrière

de 8 min 50 à 10min 20 : le « fanatisme japonais ». Nous empruntons une culture que nous ne comprenons pas

Je partage l’intégralité de ses opinions sur ces points.
Tout ceux qui singent le Tokonoma, qui rivalisent de Kakemono abscons en prennent pour leur grade, à juste titre.

Autrement dit on peut très bien n’éprouver aucun atome crochu avec le style d’arbre « Cosmic » mais adhérer à la philosophie de l’auteur qui désigne les japonards comme des freins à notre imagination, à l’épanouissement d’une culture européenne du bonsaï.
Walter Pall, autre instigateur d’un style ancré à nos valeurs européennes (naturalistic bonsai), l’a très bien compris en ayant bien voulu rédiger l’avant-propos de l’ouvrage de Laurent Darrieux.

Laurent Darrieux propose la plateforme FaitesDuBonsai qui permet de s’inscrire à son cours (payant, c’est normal), mais aussi avoir accès librement à des articles informatifs (gratuit)

je que trouve que le Burton est un style interessant, qui ne me laisse pas indifferent. Par contre quand Law explique que les Bonsai classiques, une fois mâtures, n’evoluent plus contrairement aux Bonsai Cosmic je ne suis pas d’accord. C’est réducteur. Suffit de regarder l’évolution des arbres japonais sur qcq décennies pour s’en rendre compte.


je comprends qu’on défende et qu’on valorise bec et ongle « son oeuvre », son travail, mais c’est contre productif, selon moi, de rabaisser les autres voies. Je suppose que c’est du marketing…

Concernant l’opposition « Bonsai Japonais » et « Bonsai Occidental », soit disant plus naturel, ça me fait bien rire également. Y’a des artistes japonais qui font du classique, et d’autres qui font du « naturalistic » depuis bien plus longtemps que Walter. Cf ABE, Murata et tant d’autres.
Des exemples d’arbres japonais magnifiques et super mega naturels →







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C’est Alexis de la chaine YT « Alexis fait du Bonsai » qui a créé cette plateforme.

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Les petites phrases de Laurent Darrieux, ( @law ) ses points de vue sur l’évolutiondans le temps des bonsaïs classiques, ses considérations sur le caractère naturel ou naturalistic des bonsaïs ne m’intéressent absolument pas.

En revanche, ce que je retiens, c’est sa proposition d’ un changement de paradigme. Il nous suggère d’abandonner le japonisme.
Son discours radical met en question notre servitude volontaire à adopter les principes esthétiques d’une culture à laquelle nous ne sommes pas éduqués.
Que connaissons-nous du shintoïsme, du bouddhisme, des coutumes et principes qui en découlent ? Quelques bribes livresques, c’est tout.
Sans condamner qui que ce soit ou quoi que ce soit, il nous explique que notre culture est assez riche pour nous en inspirer naturellement.

Aaaaah ça fait du bien de se sentir libre

Le nombre d’or, les proportions, le choix de la face, le choix et la taille du pot, etc. toutes ces règles viennent du Japon et même Law les respecte aussi. Les pots choisis par Law et Vev sont souvent originaux, y compris l’accent (figurine/petit robot et non petite plante), mais les grandes lignes japonaises sont respectées. Tokonoma, tablette, espacement de l’accent par rapport à l’arbre principal et j’en passe.
On en avait dejà parlé, mais le jour où je verrai un véritable renversement de la table, avec des pots (ou des contenants) completement differents de ce qu’on voit actuellement, alors là, oui, je dirai que c’est une petite révolution. Après, oui, le style Burton est interessant et original/different. J’ai une petite préférence pour le style de Vev pour ma part :wink: Mais pour moi, ça ne vaudra jamais l’émotion ressentie devant un arbre centenaire : une émotion profonde, instinctive car on est né sur la planète terre et non sur la planète ‹ cosmic ›. On pourrait en discuter des heures mais quand quelqu’un prétend révolutionner quelque chose, perso je me méfie ^^ Les gourou, les : « rien ne sera plus pareil », les : « ta vie va changer » etc c’est pas pour moi… Une fois sur EDG j’ai osé faire une remarque à Law, et j’ai vraiment eu l’impression de parler à un gourou qui veut me retourner le cerveau :scream:

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Qu’en connaissent les Japonais ? Pas grand chose. Le Japon, c’est comme n’importe quel pays, il y a des tendances esthétiques très diverses. Au quotidien, le kitsch est très présent.

Outre l’artifice rhétorique grossier (dénoncer un danger quasi inexistant pour mieux montrer que l’on s’en préserve héroïquement)
Japonard = japonais + connard.
Ça en dit long sur la volonté de débattre.

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« Japonard »

« Japonard » est le surnom donné au sein du mouvement Nabi à Pierre Bonnard.

Puisqu’il semble qu’ici les références les plus banales doivent être détaillées, au risque d’une certaine lourdeur, je précise que le peintre Pierre Bonnard (1867–1947) a eu, à partir de 1890 et durant une demi-douzaine d’années, une période de style décoratif influencée par le japonisme. Il rompt avec les Nabis en 1895 pour se placer dans la continuité de l’impressionnisme.

Bonnard est un exemple d’emprunt de techniques graphiques nippones (aplats, pas d’ombres…), du ukiyo-e (image du monde flottant) pour les actualiser dans une démarche picturale européenne. Bonnard n’a pas peint des estampes, il s’en est nourri.

Une de mes préférées dans cette période

A l’instar de ce qui s’est fait en peinture, on aurait pu imaginer des bonsaikas européens conservant les techniques horticoles du bonsaï japonais (rempotage, substrat, tailles, techniques du bois mort etc.) mais développant des styles personnels, sortir des « estampes » en quelque sorte.

Mais non. Dans le domaine du bonsaï, la majorité ne veut pas s’émanciper.

Bonsaiphil, tu te trompe. Pour en avoir discuté avec darrieux, il utilise japonard pour japonais =connard.
J’ai hébergé les arbres de cette personne dans mon jardin pendant de longs mois et côtoyé darrieux au quotidien… au risque d’être insultant, a part laisser une trace et prendre ce qui ne lui appartient pas, rien ne l’intéresse plus que son nombril. Et je le redis, a part le manathan qu’el arbre rest en vie?

Ce dont nous débattons ici se situe au delà des questions de personnes ou de vieilles animosités.

J’essayais de comparer la démarche de P. Bonnard et l’évolution du bonsaï européen, et tu nous invites dans tes différents personnels.

Où Darrieux utilise-t-il le terme « japonard » ? Je n’ai pas trouvé. Je ne pense pas qu’il le fasse.

« Japonard » est une désignation qui fait sens dans l’histoire de la peinture fin 19eme siècle. La manière dont certains pourraient l’interpréter aujourd’hui n’engage qu’eux-mêmes.

Par ailleurs, L. Darrieux a exprimé plusieurs fois son respect pour la culture japonaise aussi bien dans son interview avec Ryan Neil que dans la vidéo en français référencée ci-dessus.

Merci d’en rester dans ce fil à un débat d’idées.

Je crois que je vais reprendre ma discussion avec @Clem, autrement plus intéressante.

Je te rejoins entièrement sur ce point

Les quelques éléments que tu cites relèvent de codes esthétiques – et non de règles - établis au Japon (sauf le nombre d’or). Je tiens à relativiser leur portée. Ils font partie des traditions nippones et je ne vois pas pourquoi il faudrait les adopter dans notre culture.

Tout au plus peuvent-ils servir de garde-fou pour tous ceux qui doivent se cramponner à quelque chose afin d’éviter les vertiges de la création.

Le problème, c’est qu’une fois ces codes adoptés, la situation devient tellement confortable qu’on y reste collé
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Me concernant, j’explique depuis des années que mon Graal est de me débarrasser de l’idée qu’un arbre possède une « face avant », un des points que tu cites. Cette face n’existe et ne se justifie que dans le cadre des expositions en rang d’oignon.

Je n’expose pas.

Et puis, construire un arbre intéressant sur 360° c’est tout même autre chose !
Je veux tourner autour de mes arbres comme lors de mes ballades. Pour le faire il faut sortir du chemin ….

On me conseille parfois sur ce forum d’autres angles de vue pour mes « faces avant ». L’idée que le concept peut ne pas s’appliquer, n’effleure pas les conseilleurs, très bien intentionnés par ailleurs.

Le principe de la « face avant » est transmis aux débutants dans les clubs par les anciens ou les formateurs. Il s’ancre, s’incruste, et fini par ne plus être mis en question.

Se débarrasser de la pseudo-nécessite de la « face avant », ne serait ce que de temps en temps, n’est pas simple. Les pots rectangulaires n’y aident pas. En même temps, je ne veux pas chausser tous mes arbres de pots ronds ou hexagonaux.

A croire que tu ne t’interesses pas non plus à ce qui se fait en Europe ou en Occident : regarde la façon de travailler les jins et bois morts de Kevin Wilson : c’est très spécial, les jins sont creusés, en dentelle, je trouve que c’est sa « marque », sa signature.
Regarde les arbres de Walter, par exemple les feuillus : je trouve qu’on les reconnait assez facilement avec leur style plus libre, plus buissonnant, moins précis et chirurgical que les feuillus japonais.
On pourrait aussi parler du style de Ryan Neil : plus sauvage, très fin dans la mise en forme, mais qui laisse des longs jins, volontairement, qui laisse de l’ecorce collée aux jins, volontairement, pour donner un coté plus emouvant et sauvage à ses arbres issus de yamadori. il a toujours voulu sortir du style de Kimura pour représenter la Nature sauvage de son pays.
On pourrait parler des arbres Taiwannais. On sorte de l’Occident, mais ils sont bien differents des arbres Japonais : beaucoup de mouvements dans les branches et ramif’s, des arbres avec une masse de branches plus importante qu’au Japon, des ramifications très importantes, des pots souvent plus colorés et profonds qu’au Japon… AMA

Bref, y’a des tas de styles differents, des tas de Bonsaika differents, venant de differents pays, des tas de nuances… mais, selon moi, pas de révolution, pas de changement radical dans les grandes règles esthétiques, les proportions, le choix du pot, la présentation etc

tu les appelles comme tu veux, des codes, des règles, mais ces codes ne tombent pas du ciel comme un cheveu dans la soupe : c’est plus élegant de contempler un tronc sur son coté concave que sur son coté convexe : on prefere un tronc qui montre de la profondeur (qui part vers l’arrière et revient vers l’avant) plutot qu’un tronc qui nous offre une bosse agressive en face avant. La position des branches, la taille des feuilles (le plus petit possible, la même taille en bas et en haut), la sortie des branches à l’exterieur des courbes (à l’interieur, dans la Nature ou en Bonsai : la branche reçoit moins de lumière et s’affaiblit, puis meurt), le mouvement comme élement de beauté (versus la raideur comme etant moins attractif), le rythme, les espaces vides (entre les branches, espace vide interieur principal), le point focal et la façon de le mettre en valeur en plaçant un espace vide et du feuillage au dessus, la profondeur (branches de profondeur), l’enracinement, la conicité du tronc et branches etc etc.

Ce sont les japonais qui ont réflechi le plus à tout ça, et qui l’on appliqué sur leurs arbres pour augmenter leur beauté et leur valeur esthétique et marchande. Si les Bonsai avaient été cutlivés depuis des décennies, siecles en Occident, plutôt qu’au Japon, je pense que les règles auraient été les mêmes car c’est logique.

Je ne regarde qu’eux !
Je les ai associés à L. Darrieux dans le titre de ce sujet, car effectivement ce sont de rares personnes qui osent secouer le cocotier.
Mais dans les clubs, dans les expos françaises (et souvent européennes) dans les remarques de forums, on voit très majoritairement du bonsaï classique et des réflexes issus de la culture nippone.
Les formateurs de la FFB doivent perpétuer les préceptes japonais

J’ai l’impression que tu estimes que les codes esthétiques du bonsaï japonais sont universels.
Me trompe-je ?

Oui, carrement ! La presentation en Tokonoma, les tablettes et accent pourraient être remplacées par autre chose, mais les grandes règles esthétiques sont, à mon avis, incontournables : assymetrie, profondeur, proportions, conicité, enracinement (arbre stable), equilibre (petites feuilles de même taille partout), tronc convexe moins elegant que tronc concave, mouvements préférables à raideur, forme du pot par rapport à la forme de l’arbre etc

ça me semble logique de transmettre des grandes règles esthétiques incontournables. une fois qu’elles sont connues, le Bonsaika peut les transgresser.
Je suppose que si on a peu de Bonsaika avec leur propre style, c’est que le Bonsai est dejà très difficile à maintenir en vie (90% c’est de la culture), et que tout le monde n’a pas une fibre artistique développée. c’est pour ça qu’au Japon ou ailleurs en Occident, les amateurs amènent leurs arbres à des pros, pour qu’ils les stylent et les rendent plus beaux.

Attention de ne pas attribuer des caractéristiques esthétiques multiculturelles (assymétrie, équilibre…) au corpus japonnais.
Tu cites la recherche de « profondeur » comme une caractéristique. Mais la profondeur n’a de sens que s’il y a une vue de face !! Un arbre autour duquel on peut tourner est profond tous azimuts

EDIT : nos messages sont en train de se croiser

Au japon un arbre n’a pas de face au final il doit être beau sous toutes ces faces et l’arbre n’est pas la finalité…

c’est une culture différente de la notre qui ne repose pas sur les mêmes choses.

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ok, moi, je parle de règles esthétiques que j’attibue au Japon (Seya Takeshi) voir ici :

http://www.espritsdegoshin.fr/forum-bonsai/topic.html?id=14700

ou ici en pdf téléchargeable :
http://arrasbonsaiclub.e-monsite.com/medias/files/esthetique-seya-takeshi-1.pdf

Mais si on est d’accord sur le fait que ces règles sont incontournables et universelles (non japonaises) c’est dejà pas mal !
quelles sont alors selon toi, les règles Japonaises au sens strict ? Si c’est la présentation en Tokonoma et tablette, on sera d’accord pour dire que c’est pas indispensable ^^