La mycorhize est le "World Wide Web" du règne des plantes

La communication en réseaux existerait dans le règne végétal depuis bien avant que l'homme n'ait inventé l'Internet et le "World Wide Web" :

 

 

Un article scientifique (parmi d'autres...) sur la manière dont les plantes utilisent des signaux acoustiques pour communiquer ensemble :

 

http://www.livescience.com/27802-plants-trees-talk-with-sound.html

 
Monica Gagliano (spécialiste de physiologie végétale à l’université de Crawley en Australie) va même plus loin : Gagliano pense que des alertes de racines à racines pourraient transformer une forêt en un immense réseau de communication.
 
"Si l'on considère que les forêts sont toutes interconnectées par des réseaux de champignons, les plantes utilisent peut-être les champignons de la même manière que nous utilisons internet pour envoyer des signaux acoustiques à travers le web. A ce stade des recherches, qui sait ?", dit-elle.

P.S.: Les experts appellent cela le "Wood Wide Web"

 

(cf. http://scholar.google.fr/scholar?q=%22Wood+Wide+Web%22&hl=fr&as_sdt=0&as_vis=1&oi=scholart&sa=X&ei=9Mn4UrnDLomrhQfT_oGQAg&ved=0CCsQgQMwAA)

 

 

 

Lentement même les plus sceptiques devraient réaliser que les parallèles entre les organismes végétaux et animaux sont frappants...

très intéressant...dans le même style, j'ai eu l'occasion de voir un reportage (Arte ou France 5) sur les champignons et notamment leur symbiose avec les végétaux.

Si on part du principe qu'un arbre est statique, celui-ci ne peut se nourrir que sur une surface donnée ou limitée car le développement racinaire n'est pas illimité. Contrairement aux racines, le champignon est capable de se développer plus rapidement et sur de grandes surfaces...la symbiose semble être une bonne solution pour trouver toujours plus de nutriments. De plus, certains pensent que les myco peuvent s'apparenter à des systèmes nerveux périphériques capables de gérer les besoins...on se sent bien petit :spb95:

Tout à fait.

 

En plus, les échanges champignon-arbre ne se restreignent pas à un seul arbre ni à un seul champignon, comme ont pu notamment le démontrer Andres Wiemken et Florian Walder de l'Universtité de Bale l'an dernier.

 

Déjà en 2010 l'équipe autour du biologiste Yuan Song avait découvert que les tomates se préviennent les unes les autres lors d'une attaque d'oïdium à travers leurs champignons mycorhiziens (dès qu'un plant de tomate est touché, les autres plants de tomate sont prévenus grâce à des signaux transmis à travers les champignons symbiotiques).

 

Et on sait aussi que lorsqu'un champignon colonise les racines d'une plante, il doit d'abord signaler à la "plante-hôte" qu'il n'est pas un parasite.

 

Il y a une communication très étendue sous terre.

 

Rien d'étonnant d'ailleurs si on se souvient que plus de 80% des surfaces terrestres sont reliées entre elles à travers les champignons.

 

Et ceci depuis longtemps : depuis 500 millions d'années...

Il y aurait tant de choses à dire...

 

Par exemple, saviez-vous que les racines de certaines plantes envoient des signaux électriques au reste de la plante ?

C'est le cas du mais, dont les racines envoient un signal électrique au reste de la plante pour dire qu'elles veulent de l'eau !

Les plants de tabac vont même plus loin (cf. les travaux de Axel Mithofer de l'institut Max-Planck) : lors d'une blessure ils envoient immédiatement un signal électrique constant pour lancer la production d'anti-corps, et un peu plus tard ils envoient un second signal électrique variable qui contient l'information sur l'étendue de la blessure.

 

De plus en plus de scientifiques s'accordent à dire que les plantes ont une sorte de "système nerveux" (puisqu'elles enregistrent toutes les modifications dans leur environnement, réagissent à ces modifications, etc).

 

Plus récemment, on a découvert la manière dont les plantes réagissent à la variation de la température. On savait déjà que les plantes réagissaient à une variation de température d'un seul °C, mais on ne savait pas encore comment.

Les biologistes autour du spécialiste Philipp Wigge ont découvert comment les plantes réagissent à une baisse et à une augmentation de la température : elles modifient l'emballage de leur DNA selon la température !

 

Et les plantes ressentent immédiatement les changements de température et elles réagissent très vite. Quand on sait que dès que la température intracellulaire dépasse 40°C, les protéines se dénaturent, pour éviter ça les plantes créent des protéines protectrices ("heat-shock-proteine"). Et ceci se produit extrêmement vite.

 

Les plantes nous donnent souvent une impression de lenteur, parce que nous percevons leurs mouvements comme un processus de croissance lente. Mais au niveau cellulaire, les plantes sont très rapides. Elles répondent rapidement et immédiatement aux changements environnementaux. C'est quelque chose qui est encore largement sous-estimé...

Tous les organismes ont des HSP (Heat Shock Protein)... justement pour protéger l'ADN (entre autre). ;-)

impressionnant

Spectaculaire, certainement, impressionnant je ne suis pas sûr : que des racines envoient un signal électrique pour dire qu'elles veulent de l'eau, c'est juste me semble t-il, constater qu'elles sont vivantes, puisqu'il s'agit d'un mode de communication interne à tout organisme vivant.

 

Dans l'article cité initialement, qui date de mai 2013, il me semble que le seul aspect spectaculaire est dans la comparaison avec le web (tout est dans le "peut-être"), comparaison un tantinet anthropomorphique, et à ce titre totalement absurde : les plantes disposent certainement de modes de communication que nous ne connaissons pas, mais pourquoi vouloir à tout prix que leurs modes de communication ressemblent aux nôtres, ou même à celles d'autres espèces du monde animal ?

Et quand l'article traite de la cavitation (appelé ici "embolism" - là encore, c'est parce que le lecteur moyen ne connait pas le terme, alors on en utilise un qu'il croit connaitre), on cite quelques cas où on a pu constater que des arbres ont pu réparer les dégats (sans aucun lien d'ailleurs avec une communication autre qu'interne, ni avec un son quelconque), alors que cet accident est une des causes principales de décès des arbres en haute montagne.

 

Dans un article antérieur, publié un an avant (mai 2012) dans une revue scientifique, un peu moins "journalistique" : Plos One, Madame Gagliano est beaucoup plus dans le constat scientifique et beaucoup moins dans le populaire, et on voit que les expériences sur lesquelles est basé l'article ont été réalisées sur des semis, en les plaçant dans des conditions de proximité et d'isolement qui ne doivent pas se reproduire fréquemment dans la nature. (pour ceux que cela intéresse, cet article a été commenté en français par Pierre Barthélémy sur son blog Passeur de sciences en juin 2012. Il est beaucoup plus modéré dans ses conclusions)

 

Je préfère de très loin, si on doit citer une phrase de l'article, utiliser celle qui dit (juste après) : "comme dans d'autres formes de vie, si les plantes envoient des messages par le son, c'est une parmi de nombreuse voies de communication".

 

Tout cela n'est pas du scepticisme, au contraire, car encore une fois, je suis profondément convaincu que nous avons encore beaucoup à apprendre sur le monde végétal. Mais pourquoi vouloir trouver dans d'autres formes de vie nos instruments de compréhension, de communication, de survie ?

ici par exemple,

 

 

ou

Et à dire vrai, la transmission de l'électricité dans la plante est connue depuis un peu plus longtemps, mais là encore il faut faire abstraction des shémas de raisonnement anthropomorphique : l'électricité n'est pas celle que nous connaissons, mais la transmission de changement de polarisation, et la transmission fait encore l'objet d'études (en gros, transmission par le xyléme ou bien par turgescence des cellules vivantes).

 

Voir ici (cela date de 1998) une étude sur la transmission électrique d'un signal de brulure chez la tomate qui induit la génération d'une protéine de croissance.

Merci Michel pour ton commentaire (critique et pertinent).

 

Sous l'article de Pierre Barthélémy, il y a quelques commentaires très intéressants :

 

 

 

On connaît le mimosa très bien: le signal se transmet électriquement, par dépolarisation de membranes, et expulsion de sucres en échange des quelques ions. Comme pour les nerfs. la seules différence est que les cellules en question sont moins spécialisées que les nerfs, et plus réparties, soit dans le limbe de la feuille, soit dans le parenchyme des veines. C’est très joli et se mesure très bien: on place un fil électrique autour d’un pétiole de mimosa, et on mesure le champ induit par le passage du courant électrique (Ampère). Avec deux boucles on peut mesurer la vitesse de propagation du signal (assez variables selon les conditions).

Dans le cas de la Dionée, c’est l’ensemble du limbe de la feuille en traint de se contracter qui transmet le signal électrique (comme une onde circulaire).

La propagation de ces ondes électriques (et ou chimiques) font dire à certains que les plantes « ont bien un cerveau, mais qu’à la différence des animaux, il n’est pas différencié dans un organe donné, mais réparti sur l’ensemble de la plante »…

 

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En fait, c’est même plus compliqué.

Les plantes sont à la fois en concurrence et en complémentarité. Dans un écosystème complexe (milieu naturel), il peut y avoir concurrence entre espèces différentes et moindre concurrence entre plantes de la même espèce.

Mais dans un système biologique ultra-simplifié, comme un champ agricole, c’est exactement l’inverse : à part quelques « plantes indésirables » (que les agriculteurs nomment généralement « mauvaises herbes »), les plantes d’espèces différentes sont moins en concurrence que celles de même espèce ! En effet, deux épis de blé génétiquement identiques (dans un champ de blé, tous les épis sont des clones, ils sont génétiquement identiques) se livrent une concurrence sévère vis-à-vis des ressources du sol : l’agriculteur doit par conséquent bien gérer la densité de semi. Mais si vous semez ensemble deux céréales différentes, cette concurrence entre les épis est moins forte… et le rendement global de la parcelle est augmenté (cela est évidemment encore plus net en mélangeant des plantes de familles différentes).

Dans des systèmes agricoles complexes (cultures associées), les plantes d’espèces différentes ne se concurrencent pas mais se complètent formidablement : les légumineuses apportent de l’azote organique aux céréales, les céréales servent de tuteur aux légumineuses, les plantes qui ont besoin d’une luminosité modérée bénéficient de la présence de plantes plus hautes qui captent l’essentiel de la lumière, etc.

Et en fait, ce schéma se retrouve évidemment dans la nature : certains arbres ne peuvent PAS pousser en plein soleil, et ont donc impérativement besoin d’autres arbres plus élevés et qui leur font de l’ombre. Dire que les plantes différentes seraient forcément en concurrence, notamment sur la lumière ou les ressources du sol, est donc largement faux. C’est en fait un système complexe avec des concurrences et des complémentarités.

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Enfin, il est important de savoir que dans un sol équilibré, les arbres construisent une armature racinaire extraordinaire, la mycorhize, qui est construite par des champignons (en associant également des bactéries) et qui présente la particularité de constituer un réseau d’interrelations entre plantes ! Les différents arbres (d’espèces différentes !) s’interconnectent par la mycorhize… mais également les plantes herbacées et une grande partie de l’écosystème.

En quelque sorte, puisque les champignons de la mycorhize peuvent apporter aux plantes des éléments nutritifs que celles-ci ne peuvent pas trouver toutes seules, et puisque ces champignons, pour vivre, ont besoin que les plantes leur apportent des éléments carbonés, la mycorhize sert de « réseau universel » auquel toutes les plantes de la parcelle se connectent.

Dans une telle configuration, ce réseau devient une sorte de « pot commun » où les uns et les autres échangent des nutriments et notamment de l’eau. Il est ainsi possible d’avoir des cultures très fertiles dans un sol très sec, puisque les plantes agricoles bénéficient de l’eau pompées par les arbres, il est possible de disposer de phosphore assimilable, etc. Les rendements connaissent alors un bond spectaculaire.

Inutile de dire que dans un tel écosystème, la notion de « concurrence » entre plantes est considérablement relativisé.