Bonjour P-B,
J’interviens ici non pas parce que j’ai un compte à régler avec la personne à la base de ce sujet, mais simplement parce que des débutants peuvent lire ce qu’il est dit en début de post et le prendre pour argent contant.
Plusieurs membres lui ont dit qu’il était dans l’erreur, mais, bille en tête, il ne semble pas vouloir tenir compte des autres avis que le sien.
Aussi, la critique étant facile, trop facile, je ne vais pas polémiquer et corriger ce qui a été dit.
Je vais me contenter de vous partager ce que l’on m’a appris en ce qui concerne les tablettes.
Alors, voilà
Les tablettes :
Les tablettes doivent être:
Toujours le plus simple possible, elles ne doivent pas attirer l’œil.
Elles doivent mettre l’arbre en valeur, c’est lui la vedette de la présentation.
Elles sont foncées, presque noires et presque mates (satiné).
En principe, elles n’ont pas de dépassant.
Le fil du miroir (panneau central de la tablette) est toujours dans le sens des étagères, jamais dans la direction du visiteur. En d’autres mots, les lignes du bois seront toujours orientées dans le sens de la longueur.
Leur assemblage se fait sans clou ni vis.
C’est pareil pour le Kazaridana ”étagère à Shohins” ainsi que pour les “Jita”.
Mochicomi (soins) pour les tablettes:
À l’aide d’un chiffon en soie, lustrer les tablettes avec des mouvements circulaires.
Manipuler les tablettes avec des gants blancs.
Manipuler le pot avec précautions.
Ne pas transporter la tablette et le pot ensemble, ce dernier pourrait bouger et rayer son support. Il faut prendre l’habitude de lever, bouger et poser les pots. Il ne faut donc jamais les traîner sur le plateau de l’étagère.
Si vous voulez garder vos amis, ne prêté jamais vos tablettes.
A ce sujet, si ça vous intéresse, j’ai une façon de procéder pour déplacer les arbres lourds sur une tablette.
Je prends deux bandes de tissus bien épais du genre serpillière (torchon pour mes compatriotes) ou mieux, du cuir-peau souple que j’ai découpé dans un tablier de soudeur.
Je les place sur la table juste à l’endroit où je vais déposer les pieds du pot, je pose le pot et peux ainsi le déplacer sur la tablette sans la rayer.
Une fois en place, je prends du recul pour vérifier le bon placement et je soulève le pot d’un côté (gauche ou droit, peu importe) et j’enlève la première bande de tissu puis je soulève l’autre côté et j’enlève la dernière pièce de tissu sans avoir déplacé mon arbre ainsi, je n’ai pas rayé ma table.
Le placement du pot sur la tablette :
Contrairement à ce que beaucoup pensent, sur une tablette rectangulaire, on peut place l'arbre légèrement décalé à gauche s'il va vers la droite et vice versa, de ce fait accentuera un peu le sens de la présentation.
Sur les tablettes rondes ou carrées, le pot est placé au centre.
Les bords des pots ne doivent jamais dépasser la rainure du plateau (miroir) de la tablette.
Le choix de la tablette :
Il y a tablette et tablette, il faut faire la différence, tout est affaire de subtilité, le bonsaï n’est pas japonais pour rien.
Comme pour les pots, les tablettes doivent être en accord avec la stature de l’arbre, son essence (conifère ou feuillu), de son style et sa forme. Je parle ici du Shin, Gyo, So.
Je sais que certaines personnes y sont allergiques,
mais c’est pourtant la base de la présentation du bonsaï pour celles et ceux qui souhaitent en faire correctement.
Je pourrais vous en parler longtemps, mais pour faire simple…
On va du Shin, simple, carré, donnant une impression de robustesse, jusqu’à des formes de plus en plus élégantes et arrondies pour arriver au So qui est très fin, très aérien.
Donc :
Le shin est formel (masculin, carré).
Le gyō est semi-formel (féminin, élégant).
Le sō est informel (aérien, très fin).
Je ne parle pas des sous-catégories de ses trois groupes afin de ne pas compliquer ces informations.
Les tablettes Shin.
La tablette doit être le plus simple possible, massive et sans aucune décoration, car l’arbre est l’objet principal.
Lez tablettes (SHOKU) Shin/shin doivent être très robustes, les pieds tournés vers l’intérieur augmentent cet effet de solidité.
Elles ne doivent pas avoir de dépassants (le plateau du dessus ne dépasse pas les pieds.
Les tablettes Shin doivent être en relation avec les pots qu’elles supportent.
La mise en valeur se fait au niveau de l’arbre, la table doit rester plus modeste.
La couleur des tables marron foncé ou très foncée. Le foncé accentue l’impression de robustesse, l’aspect lourd de la table.
L’aspect doit être patiné sans traces de doigt (gants blancs).
Les tablettes Gyo.
Les tablettes Gyo doivent être en relation avec les pots qu’elles supportent, la tablette à barreaux (SANJOKU) est d’une utilisation sûre et facile. Des conifères avec un tronc fin peuvent être exposés avec ces tablettes.
Les tablettes doivent être de couleur foncée jamais en bois brut. Pas de couleur noire, mais marron foncé, jamais de marron clair. La couleur foncée va avec la lourdeur du bois et le poids de la table.
Les tablettes Gyo/gyo sont plus fines que les tablettes Shin, mais elles restent simples.
Tablettes en bambou pour Gyo seulement et au printemps.
Les tablettes So.
Utilisation de nattes de bambou est autorisée durant le printemps, l’été et le début de l’automne.
On dit souvent, les tables à barreaux sont destinées uniquement aux feuillus…
Ce n’est pas tout à fait exact, c’est un peu plus subtil que ça. Le bonsaï n’est-il pas une affaire de subtilité ?
Une table à barreaux peut convenir à des conifères pour autant qu’il soit très fin (Shin/So).
Les forêts de conifères sont considérées comme des arbres féminins et donc “classées” dans la catégorie Gyo et peuvent être exposées sur une table à barreaux.
En ce qui concerne les différents supports pour shitakusa :
On utilise le terme “Jita” à tort pour l’ensemble des supports des shitakusa.
Une fois de plus, c’est plus subtil que ça.
Il y a :
Les Jita :
Ce sont des tranches de tronc sciées.
Les Yatsuhashi :
Planchettes de bois, que l’on les utilise par 3 ou 5.
Petite info en prime, la première de ces planchettes, celle le plus proche du spectateur indique le sens de la présentation. C’est elle qui doit être la plus proche du bonsaï.
Les Mizuita :
Ce sont des planchettes de formes géométriques
Ces trois premiers (Jita, Yatsuhashi et Mizuita doivent être très fines en épaisseur.
Ils sont toujours de couleur foncée, identique à celle de la table. Eh oui, il y a une répétition dans une présentation, mais sans aucune redondance.
Quant aux Sunoko qui sont en bambou, on ne les teinte pas évidemment
Par contre on ne les utilise qu’au printemps.
Au Japon, on les appelle également "Kadai".
On n’expose pas de kusamo avec un bonsaï, c’est uniquement des shitakusa.
Voilà, c’est ce que l’on m’a appris sur les tablettes, il s’agit du bonsaï traditionnel (c’est à dire comme on les présentait dans le temps).
Les Japonais ont eu tout le temps d’étudier ce qui fonctionnait et ce qui ne marchait pas que ce soit pour les règles* des styles comme pour les présentations, faisons leur confiance.
*Je déteste ce mot “Règle”, pour moi, il s’agit plutôt de conventions que de règles.
Bien évidemment, avec le temps, les choses changent et évoluent, si vous regardez les photos d’expositions japonaises comme les Kokufu Ten, Taken Ten et autre, les règles traditionnelles sont quelque peu transgressées. Par certains exposants qui ne maîtrisent pas les conventions ou qui ont parfois un but mercantile (pas tous, heureusement).
Je compare souvent cet enseignement du bonsaï traditionnel et le Shin, Gyo, So à ceci :
L’enseignement du bonsaï traditionnel est l’apprentissage de code de la route.
Le bonsaï étant une voiture.
Si vous connaissez les règles de conduite et que vous les respectez, quelques soit votre voiture vous rencontrerez peu, voir pas de problème.
Par contre, on peut avoir une Ferrari ou ne Porche et décider de rouler à gauche, et là…
Tout ça pour vous dire que vous pouvez avoir un magnifique bonsaï, si vous ne connaissez pas les règles de présentation… Les spectateurs ne ressentiront pas de sérénité et la présentation de votre magnifique arbre risquera d’être gâchée.
En d’autres mots, comme le disait Monsieur Idéo Suzuki, il faut connaître les règles. Il faut les apprendre et les connaître par cœur, pour pouvoir les oublier et y revenir en cas de problèmes.
Vous l'aurez compris, le Toriawase qui est l’art d’assembler les différents éléments pour une présentation en Tokonoma ou en Kazaridana est un sujet qui me passionne depuis des années. Je pourrais également vous parler longtemps du placement des différents éléments et de ses différentes conventions, mais c’est une autre histoire.
Je ne souhaite pas polémiquer, on prend c’est bien, on ne prend pas, c’est bien aussi, l’avantage, c’est que c’est gratuit. 
Une dernière chose, une citation que j'aime beaucoup.
“Le temps ne pardonne pas ce qu'on fait sans lui. ”